Bilan, à mi-juin 2024, des occupations d’écoles dans l’agglo grenobloise avec l’Intersyndicale “Enfants migrant·e·s ? À l’école !”.
Comme au niveau national, dans les écoles, collèges et lycées de l’agglomération, nos organisations syndicales et le RESF sont alertés d’un nombre croissant d’élèves à la rue. Durant cette année scolaire nous avons eu, en permanence, des remontées d’écoles et d’établissements nous alertant sur des situations d’élèves sans toit.
Sur l’agglomération, nous estimons à 450 le nombre d’enfants à la rue, en squat, bidonvilles, hébergé·e·s chez des tiers ou dans des hébergements dont ils et elles vont être expulsé·e·s, dont 250 sur la seule ville de Grenoble. Il s’agit le plus souvent d’enfants dont les familles sont en demande d’asile, ou déboutées du droit d’asile, sans papiers ou de mineur·es non accompagné·es.
L’augmentation du nombre de familles avec enfants à la rue s’explique par le manque de places d’hébergements, le manque de logements sociaux, et par la politique d’expulsion sans solution des squats, bidonvilles et hébergements de demandeurs·euses d’asile débouté·e·s. Pour les mineur·e·s non accompagné·e·s, leur présence massive à la rue s’explique par les dysfonctionnements liés à l’évaluation de leur minorité (critères non fiable, soupçon permanent, délais très longs et absence de protection le temps de cette évaluation). À cela s’ajoutent les effets des lois anti pauvres et racistes criminalisant et précarisant davantage encore les sans papiers, sans-domiciles et mal-logé·e·s.
L’État ne respecte pas le droit inconditionnel à l’hébergement pourtant garanti par le Code de l’action sociale et des familles et le Conseil départemental de l’Isère s’assoit sur la protection de l’enfance.
Pour les familles ayant réussi à obtenir un hébergement, même avec un toit sur la tête, la situation reste totalement indécente : hébergements ponctuels parfois juste pour la nuit avec remise à la rue le matin, hébergement pérennes mais dans des lieux isolés éloignés des moyens de transport et des lieux de scolarisation (comme à Voreppe et Moirans), parfois insalubres, avec des chambres inadaptées à la taille des familles, une interdiction de cuisiner, un contrôle social très fort…
Ces situations d’extrême précarité constituent une entrave majeure au droit à l’éducation et concernent bel et bien l’école et l’institution scolaire : il n’est pas possible d’apprendre en dormant mal, en ayant peur, faim et froid.
Heureusement face à la défaillance des institutions, la solidarité des personnels et des parents d’élèves s’organise partout en France. Des collectifs se mobilisent autour des familles et élèves à la rue notamment en occupant des écoles. À Grenoble, depuis la rentrée, avec le soutien de RESF, de la FCPE, du DAL et de l’Intersyndicale “Enfants migrant·e·s”, 12 écoles ont été occupées pour mettre à l’abri 22 familles dont 56 enfants. En cette fin d’année scolaire, 9 écoles sont encore occupées pour héberger 14 familles dont 39 enfants.
Ces occupations se maintiennent malgré les pressions et menaces scandaleuses exercées sur les équipes enseignantes par la hiérarchie de l’éducation nationale et malgré le caractère intenable, pour les collectifs de parents et de personnels solidaires, de situations qui s’éternisent.
Mais la lutte paie puisqu’à Grenoble, grâce à l’action de “l’Intercollectif des écoles occupées et mobilisées de l’agglomération grenobloise”, la mairie s’est engagée à prendre en charge l’hébergement des familles des écoles occupées qui ne se seront rien vu proposer par l’État à la veille des vacances d’été.
Rien n’est pour autant réglé car nombre de familles et d’enfants vivent encore à la rue, y passeront l’été et le seront toujours à la rentrée prochaine. Il est donc de notre responsabilité à nous, personnels de l’Éducation nationale, de poursuivre et d’amplifier la mobilisation, avec les parents d’élèves, pour continuer à rendre visible la situation, la politiser. Ce n’est pas à nous de pallier les carences des institutions : les écoles ne sont pas des centres d’hébergement-bis. Continuons à mettre la pression sur l’État, le Conseil départemental, la Métro et les mairies afin qu’elles assument leurs responsabilités.
Nous exigeons qu’aucun·e élève ne subisse la violence de la privation de toit et de la précarité.
Nous exigeons aussi la régularisation de tou·tes les sans papiers présent·es sur le territoire, qui vivent ici, travaillent ici, étudient ici.
Retrouvez le dernier bilan des “enfants à la rue” ici : https://ul38.cnt-f.org/2023/10/14/enfants-a-la-rue-une-rentree-particulierement-dramatique/
Cet article est à retrouver, avec d’autres articles, dans la Gazette de “l’Intersyndicale enfants migrant·e·s ? À l’école !” :
“L’intersyndicale enfants migrant.e.s ? À l’école !” est composée de la CNT38, la FSU38 et Sud éducation Grenoble.
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