Nos utopies contre leurs profits, pour un 1er Mai révolutionnaire !


La “réforme” des retraites, passées en force en 2023, est une énième étape sur le chemin de la privatisation générale. Vaille que vaille le patronat, et son bras législatif qu’est l’État, ne fait que renforcer l’individualisme et démolir les solidarités que nous avons construites.
La prise en charge des soins de santé par l’assurance maladie de la Sécurité sociale est peu à peu transférée aux mutuelles privées. La réforme des retraites de 2023 ouvre grande la porte aux retraites privées. C’est la même logique qu’avec les mutuelles santé qui est à l’œuvre, ici on parle “d’assurance prévoyance” et autres “plans épargne retraite” (PER).
L’idée d’une assurance sociale pour toutes et tous, égalitaire, adaptée aux besoins plutôt qu’aux moyens, est remplacée par un “achat de services”, un contrat pour chaque type de population, on paie pour soi et uniquement pour soi.
Les réformes du gouvernement, depuis de nombreuses années, mènent toutes dans cette direction : la privatisation. Le capital, le patronat, les actionnaires, les rentiers veulent transformer chaque acte de nos vies en une valeur marchande, gratter partout où ils peuvent gratter. Depuis longtemps nous payons l’eau que nous buvons, la terre sur laquelle nous vivons, demain, nous paierons l’air que nous respirons.

Depuis la crise du Covid-19, nombre de travailleuses et travailleurs mal-traité·es ont démissionné malgré la peur du chômage.
Le secteur de la restauration est représentatif en la matière : travailler des heures, sur des plages horaires hachées et tardives, avec souvent des heures non comptées ou des majorations horaires non retenues, tout cela au Smic, n’est plus assez “attractif” pour contrebalancer la peur du chômage. Les patrons pleurent de ne pas trouver d’employé·es exploitables à merci. Alors le gouvernement ordonne : travailler ou crever. C’est notamment par la refonte de l’assurance chômage – et la réduction du nombre de mois ouverts par nos cotisations à l’allocation chômage – qu’il tente d’imposer la mal-paye et les conditions dégradées et dégradantes. Et pour les plus pauvres au RSA, c’est le travail obligatoire gratuit qui les attend ! Nouvelle forme, moderne, de l’esclavage. C’est ainsi que le gouvernement répond aux attentes du patronat qui réclame sans cesse une main d’œuvre “moins chère” et corvéable à merci.

Plus fort que la déconstruction du code du travail, plus fort que la casse des aides sociales, le rêve du gouvernement et du capital se construit à marche forcé : c’est la victoire de l’entreprise individuelle. Macron a toujours salué ce qu’il considère comme une avancée : l’ubérisation du travail. Chacune et chacun est une entreprise qui se vend au “marché”, sans force collective et donc de négociation et hors de tout code du travail. De plus en plus de secteurs d’activités réclament aux travailleuses et travailleurs qu’elles soient déclarées en (auto-)entreprises : un contrat à la tâche sans notion d’horaires ou de durée et avec toujours moins de cotisations sociales. Cette libéralisation de l’individu·e se répand dans la distribution, le transport, l’hôtellerie, le loisir, la restauration, le logement, la santé, le service à la personne, le bâtiment, l’éducation, la création artistique, l’industrie, la liste ne fait que s’allonger.

Les prix augmentent et une fable est inventée pour l’expliquer : l’inflation. Un mot savant pour masquer la réalité : les riches n’ont jamais été aussi riches, l’homme le plus riche du monde est Bernard Arnault et on compte 53 milliardaires dans l’Hexagone (+ 32 % en 5 ans !) ; les dividendes, l’argent versé aux actionnaires plutôt qu’aux travailleuses et travailleurs, battent des records d’année en année.
Qu’on arrête alors de nous prendre pour des imbéciles. Deux exemples : le prix du pétrole a la pompe augmente en raison de la guerre en Ukraine… Les bénéfices de Total n’ont jamais été aussi haut ! Le prix des céréales augmente pour les mêmes raisons ? Les bénéfices de l’agro-industrie, de la grande distribution et des vendeurs de pesticides explosent !
L’inflation n’est qu’un écran de fumée pour nous faire avaler l’inacceptable. Les prix augmentent parce que les capitalistes veulent toujours plus de bénéfices, parce qu’ils jouent avec les cours de l’offre et de la demande. Tout centime est bon à prendre et à ce jeux, ce sont des milliards qu’ils récoltent. L’inflation est un leurre, c’est la non-redistribution des richesses qu’elle cache.

La question de l’écologie n’est pas belle, altruiste, ou de bon ton. L’écologie se fout de nous et de l’espèce humaine. C’est l’écologie qui s’empare de nous et non l’inverse. L’évolution actuelle, le réchauffement climatique, est le terreau des conflits et des discours de haine. Les évolutions environnementales sont l’un des facteurs majeurs des migrations, des populations quittent leur lieu de vie en raison de sécheresse, d’érosion, de submersion. Ces évolutions auxquelles l’humain ne peut s’adapter ni dans sa rapidité, ni dans son ampleur, entraînent des crises majeures dans toutes les parties du monde. Et pendant ce temps-là, le gouvernement, notamment sous la férule des industriels de l’agriculture, de la chimie et de la construction, autorise les pesticides, la rétention d’eau pour des intérêts privés, bétonnent à tout va et les exemples s’accumulent chaque jour.
Ce n’est pourtant pas l’interdiction des pesticides que nous réclamons, c’est la modification complète du modèle agricole. Ce n’est pas l’arrêt de la bétonisation, c’est revoir nos modes de transport, d’habitats et nos besoins de déplacement. Ce n’est pas saupoudrer des mesures dites écologiques ici ou là, c’est arrêter de nous détruire. Et que l’on ne nous serve pas le chantage à l’emploi, les richesses produites vont bien au-delà des besoins réels de la population, c’est leur partage qui importe.

La guerre et les conflits meurtriers sont au Soudan, en Palestine, en Ukraine, en Somalie, au Yémen… partout. Et nous devons applaudir la grande nouvelle : nous sommes le 2e marchand d’armes au monde ! L’industrie française de l’armement tourne à plein régime. Chaque assassinat dans le monde – ou presque – porte la marque du made in France, chaque mort renforce notre confort et nous devrions nous en réjouir…
Macron et ses ministres utilisent un vocabulaire guerrier à chaque occasion : pour traiter une épidémie, pour augmenter la productivité agricole, industrielle, scientifique, pour imposer l’autorité de l’État et de la bourgeoisie… Il ordonne même aux femmes de procréer (!) lors d’un discours hallucinant et pourtant bien réel de janvier 2024.
Nous devons refuser de travailler pour l’armement, à commencer par ses bureaux d’ingénierie qui pullulent à Grenoble. Nous devons empêcher toute exportation d’armes ou de leurs composants quelque soit leur destination. Nous devons refuser de préparer la guerre, il n’en existe pas de bonne.
Macron nous réclame d’être chair à patron et qu’importe si nous devenons, demain, chair à canon : les profits des dirigeants de nos entreprises de mort sont colossaux.

Face à ce tableau cauchemardesque mais pourtant réaliste, que pouvons-nous faire ? Il est aisé de se laisser aller au fatalisme face à ces puissants qui nous soumettent et à ces peurs dans lesquelles nous sommes éduqué·es. Et pour supporter ce fatalisme, la tentation du cynisme est forte : savoir que l’on est exploité·e pour accepter cette exploitation, jouer leur jeu sans en être dupe… Piètre contre-feu… Et le cynisme mène bien vite à l’individualisation : parce que l’on se sait exploité·e, on pense que l‘on saura naviguer entre les gouttes pour se hisser à une meilleure place. Mensonge inculqué depuis l’enfance : “quand on veut, on peut.” Non, on ne peut pas, car seul·e il est vain de lutter contre le gouvernement, rappelons ici que 19 ministres sont millionnaires et comptent le rester ou devenir milliardaires, ou de lutter, seul·e, contre le patronat qui dirige et collecte les revenus de l‘ensemble de la production des travailleuses et travailleurs. La “méritocratie” est un discours pour nous faire croire que le capitalisme serait égalitaire.
Mais alors pourquoi ne pas croire à la fatalité d’un monde meilleur ? La solidarité, l’entraide, l’action commune, la production pensée et partagée collectivement, voilà ce que la CNT tente d’organiser, ici et maintenant, malgré les attaques de plus en plus violentes que nous subissons. Et si nous ne garantissons rien, aucune victoire, aucune réussite, nous savons que ce chemin a le mérite d’un horizon qui chante.

Nous n’avons pas de plans tout tracés et nous n’en voulons pas. Nous ne promettons pas le Grand Soir et nous ne voulons pas le pouvoir. Nous voulons abolir le pouvoir et inventer des rapports sociaux qui l’empêche de s’exprimer quelques soient les circonstances.
Nous voulons la fin des classes sociales car il n’y aura plus qu’une seule classe sociale, ni plus haute ni plus basse qu’aucune autre, ni exploiteurs, ni exploité·es.
Nous voulons la fin du patriarcat car la domination des hommes sur les femmes est un autre système d’exploitation tout aussi violent. Nous voulons la fin de tous les systèmes d’oppressions : ni le lieu de naissance, ni la classe sociale, ni aucune caractéristique physique, mentale ou spirituelle ne peut justifier une oppression.

Parce que nous mangeons, dormons, nous déplaçons, nous habillons, nous devons produire. Et produire seul·e est illusoire, ou si peu efficace que la production en deviendrait une aliénation permanente, il n’y a donc de possibles que via le collectif. Et c’est pourquoi nous nous organisons par le syndicat : produire bien, dans de bonnes conditions, au juste besoin, avec du sens, pour toutes et tous. Voilà l’ambition de la CNT.

Nous luttons pour de meilleurs salaires car nous refusons de nous contenter de survivre. Pourtant, nous sommes contre le salariat. Nous luttons pour la défense des caisses de sécurité sociale, pourtant nous sommes contre bien des fonctionnements du système en place. Nous luttons pour de meilleures conditions de travail. Pourtant nous rejetons l’ensemble de l’organisation actuelle du travail. Nous luttons ici et maintenant pour des conditions de vie meilleures.

Nous luttons avec les moyens que nous laissent le patronat et l’État, pourtant nous ne croyons pas en l’équité d’une justice écrite et appliquée par la bourgeoisie. Nous luttons aussi par l’action directe, sans délégation de nos luttes.

Nous construisons notre syndicat et nos luttes selon ce que nous prônons et c’est donc ici et maintenant que nous tentons d’appliquer ce que nous pensons juste. Nous expérimentons les rapports sociaux, les modalités et les organisations que nous espérons pour demain. Et nous ne nous berçons pas d’illusions : nous sommes issu·es d’un contexte social qui ne nous a pas préparé aux changements que nous visons. Nous ne sommes pas meilleur·es que quiconque mais nous essayons d’évoluer, par la réflexion et la pratique. Ce chemin nous renforce dans nos luttes et notre envie d’un avenir meilleur, un avenir révolutionnaire.

Face à cette farouche volonté d’une autre société dont les dominants d’aujourd’hui seront les seuls grands perdants, nous ne nous faisons pas d’illusion : le patronat, l’État, les rentiers, toutes les castes qui profitent du capitalisme sont sans pitié.
Le gouvernement ne faiblit jamais dans la répression. Il estime légitime l’emploi d’armes de guerre pour protéger un trou à Sainte-Soline ou pour instiller la terreur à chaque manifestation. Il décore ses forces de l’ordre qui mutilent et tuent. Il criminalise les voix dissidentes, invente des mots tel éco-terrorisme, chante une guerre de civilisation, impose des réflexions binaires face à la complexité humaine.

Nous n’aurons que ce que nous prendrons. Et nous ne prendrons que grâce à l’instauration d’un rapport de force en notre faveur. Se contenter de défendre nos conquis sociaux ne suffit pas, ce sont de nouveaux à conquérir, et c’est toute la table à renverser. Se contenter de rester dans le cadre qu’il nous impose ne nous mènera jamais à une véritable conquête sociale.

La lutte radicale, celle qui remonte à la racine du mal, est dure, violente, se verra opposer tous les vents contraires de la bourgeoisie. Mais c’est la seule lutte qui vaille car la seule qui pourra réellement nous mener à des lendemains qui chantent, à un autre futur, sans domination ni exploitation.


Prendre les décisions collectivement et à la base


Retrouvez l’encadré de notre publication (papier) du 1er Mai 2024 sur la lutte contre le patriarcat, contre l’exploitation des femmes et les violences de genre et l’encadré sur l’internationalisme.


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