Lettre ouverte de L’intersyndicale « Enfants migrant·es, à l’école ! » (CGT éduc’action, CNT éducation, FSU, Sud-éducation), le 23 novembre 2025
Messieurs les présidents d’ACTIS, du département de l’Isère, de la métropole “Grenoble Alpes métropole”, Monsieur le maire de Grenoble, Messieurs le Recteur et Dasen, Madame la préfète,
Début novembre, des familles de la Villeneuve de Grenoble se sont rapprochées de l’association Droit Au Logement (DAL) suite à l’annonce de l’expulsion imminente des appartements qu’elles occupent, par le bailleur social Actis détenu et administré par Grenoble Alpes Métropole. Une première vague d’expulsion avait déjà eu lieu le 28 octobre. Malgré les alertes auprès de la Mairie de Grenoble et d’Actis, 4 familles ont à nouveau été expulsées mardi 18 novembre et laissées sur le trottoir. Parmi elles des femmes enceintes, des enfants en bas âge et scolarisé·e·s et des personnes gravement malades. Alors que la situation était connue et pouvait être anticipée par les institutions, aucune proposition de relogement ne leur a été faite, mettant leur vie déjà très précaire en danger. Heureusement, grâce à l’action du DAL et avec la mobilisation des associations locales, des habitant·e·s, des personnels et parents d’élèves des écoles où sont scolarisé·e·s les enfants, les familles ont pu occuper une salle municipale pour se mettre à l’abri. La Métro en lien avec la DDETS (État) a alors été contrainte de chercher des solutions : les familles sont actuellement hébergées à l’hôtel jusqu’à lundi soir, mais sans garantie qu’une solution d’hébergement pérenne leur soit proposée. Et les enfants sont déscolarisé·e·s depuis l’expulsion.
Ce même mardi 18 novembre, de nombreuses autres familles vivant à la Villeneuve ont été contraintes d’abandonner leurs lieux de vie précaires : elles étaient prises en étaux entre le risque d’expulsion par Actis et les menaces des marchands de sommeil qui se sont appropriés les logements vacants et en font commerce à cause de l’abandon du quartier et des politiques de rénovation urbaine. Beaucoup de père des familles concernées sont des livreurs à vélos, travailleurs précaires exploités par les plateformes comme Uber ou Deliveroo, qui bien qu’ils se tuent au travail, ne parviennent pas à se loger avec leurs familles à cause des prix des loyers, des exigences des propriétaires et des entraves administratives à l’accès à la régularisation et au logement social.
Toujours avec le soutien du DAL, rejoint par plusieurs organisations, associations et collectifs (Intersyndicale Enfants migrant.e.s à l’école (SUD, FSU, CNT, CGT éducation), Mme Rutabaga, Intercollectif des écoles occupées, CGT des livreurs à vélos, Adali) une occupation de la Métro a été lancée mercredi 19 novembre. 70 familles soit 150 personnes dont 30 enfants pour la plupart de moins de 3 ans y sont actuellement installées. Réunies en collectif, les familles et leurs soutiens sont en cours de négociation avec la Métro et Actis pour l’arrêt des expulsions, la protection des victimes de marchands de sommeil et des solutions de relogement pérennes pour toutes sans exception.
Pour l’instant, bien que des manquements ayant amené aux expulsions massives de ces dernières semaines ont été reconnus, Actis refuse de mettre fin à sa politique d’expulsion dans le quartier de la Villeneuve prétextant, sans scrupule, que c’est l’outil pour lutter contre les marchands de sommeil ! La Métropole évoque un bâtiment vide appartenant à l’EPFL (établissement public foncier, qui gère de nombreux bâtiments vides) qui pourrait être utilisé pour loger les familles et dit étudier d’autres pistes avec les maires de l’agglomération et la préfecture, qui n’ont pour l’instant pas l’air de se précipiter à la recherche de solutions.
Face à la situation actuelle, nous saluons la lutte déterminée menée par les familles concernées et leurs soutiens. Nous dénonçons la situation scandaleuse d’extrême précarité que les institutions font subir à toutes ces familles, et en particulier aux enfants, empêché·e·s de grandir et d’apprendre sereinement et mis·e·s en danger dans leur intégrité physique et mentale. Cette situation est la conséquence de l’incurie des institutions qui renient leurs propres lois et abandonnent leurs responsabilités : droit inconditionnel à l’hébergement et droit au logement pour l’État, protection de l’enfance qui inclut l’hébergement des femmes enceintes et des mères isolées avec enfants de moins de 3 ans pour le Département, droit à l’éducation qui est conditionné par l’accès à des conditions de vie décentes, défense et protection de tou·te·s les habitant.e.s et notamment les plus fragiles par les collectivités locales.
Cette situation n’est malheureusement pas isolée puisque que le nombre de familles à la rue ou en habitat indigne dans l’agglomération grenobloise est en constante augmentation. 11 écoles sont aussi actuellement occupées par des collectifs de parents d’élèves et de personnels de l’éducation pour mettre à l’abri 14 familles dont 45 enfants.
Face à la maltraitance, la criminalisation et au déni de droit que l’ensemble de ces familles subissent, nous exigeons :
- l’arrêt des expulsions par le bailleur Actis sans avoir trouvé au préalable des solutions de relogement dignes et pérennes pour l’ensemble des familles concernées
- la mise en place par Actis d’une véritable protection des familles victimes des marchands de sommeil qui se sont appropriés ses logements et tirent profit de la vulnérabilité des personnes sans toit
- des solutions immédiates de relogement dignes et pérennes pour toutes les familles déjà expulsées de la Villeneuve,
- l’ouverture de places d’hébergement de l’État et du Conseil départemental dans le cadre de la protection de l’enfance, à proximité des lieux de vie, de socialisation et de scolarisation pour héberger TOUTES les familles à la rue ou en habitat indigne SANS CONDITIONS
- la réquisition par l’État, les mairies et la Métro des milliers de logements vacants de l’agglomération.
- la régularisation immédiate de toutes les personnes sans papiers concernées.
Parce que pas un·e enfant, pas une personne ne doit subir la violence de la précarité et de la vie à la rue, nous réaffirmons que nous continuerons à nous mobiliser avec les premier·e·s concerné·e·s et à occuper les lieux publics tant qu’il le faudra pour obtenir un toit, une école, des papiers et l’égalité pour toutes et tous !
L’intersyndicale « Enfants migrant·es, à l’école ! »
(CGT éduc’action, CNT éducation, FSU, Sud-éducation),
le 23 novembre 2025
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