Samedi 1er avril, manifestation : de l’eau, pas des puces !

Plusieurs collectifs appellent à manifester samedi 1er avril en direction des industries les plus polluantes de la “cuvette grenobloise”, en particulier en direction de celles qui s’accaparent l’eau. La CNT 38 soutien cet appel qui correspond à notre vision de l’écologie… et du travail !

Car nous sommes pour le travail qui permet de construire localement une pro­duction décidée collectivement, de faire les plans d’aménagement du territoire libéré des intérêts privés et spéculatifs, de démolir la mise en concurrence des personnes et des territoires, de démon­ter l’idée échafaudée par les élites selon laquelle nous ne serions pas capables de nous organiser sans chef. Bref, un travail à l’absolu opposé de celui qui est imposé dans les entreprises telles que STMicroelectronics ou Soitec.

Samedi 1er avril cortège à 10h30 à partir de la gare de Brignoud

Depuis Grenoble :
En vélo : départ collectif, rendez-vous 8h30 place Vaucanson. Il y a une bonne heure de trajet, soyez à l’heure.
En train : départ 10h05, gare de Grenoble, arrivée 10h28, gare de Brignoud
Fin de la manif : pique-nique partagé à Crolles, alors, n’hésitez pas à ramener de quoi grignoter !

Nous reproduisons ici des extraits de ces appels.

Appel de STopMicro (https://stopmicro38.noblogs.org/) :

Rappelez-vous cet été dans la cuvette grenobloise, la canicule était mortelle, on a atteint 43°C à certains endroits. Dès le 7 juillet, le préfet de l’Isère plaçait plusieurs secteurs en « Alerte niveau 3 » : le dernier niveau avant celui dit de crise. […]

La cuvette grenobloise, ce sont aussi des entreprises hautement énergivores et polluantes (pas moins de 19 usines classées Seveso) ainsi que le premier pôle européen des nano-technologies. Ce secteur est spectaculairement gourmand en eau : pour nettoyer une seule plaquette de silicium, sur laquelle sont gravés des circuits électroniques, il faut lui envoyer 1 700L d’eau pure.

L’entreprise la plus néfaste dans le coin c’est STMicroelectronics à Crolles. Non contente d’être classée site SEVESO seuil haut, à cause de l’utilisation de 20 000 tonnes de produits chimiques par an, parmi lesquels certains extrêmement dangereux : amoniac, chlore, hexafluorure etc., elle remporte conjointement la palme de la plus grande consommatrice d’eau et d’électricité de la cuvette. La consommation d’électricité de l’usine de Crolles équivaut à celle de 139 000 Grenoblois·es. Quant à l’eau, même en période de sécheresse, STMicro et son voisin Soitec, nos deux producteurs locaux de puces, bénéficient de dérogations pour continuer à consommer leurs 16 800 m3 quotidiens d’eau potable.
Une consommation en constante augmentation, censée atteindre les 29 000m3 quotidiens à l’horizon 2023-2024… L’équivalent de 700 000 douches par jour ! Une dilapidation pas prête de s’arrêter quand on sait que l’Europe ambitionne d’atteindre les 20% du marché mondial d’ici 2030 : la production de puces est en effet un enjeu de souveraineté industrielle et militaire. […]

Mais le pire dans tout ça, c’est que ce pillage de nos ressources en eau potable se fait avec le soutien des pouvoirs publics et des élu·es de tout bord qui voient dans ces entreprises de nanotechnologies le fleuron local, permettant à celles-ci de puiser l’eau de nos nappes phréatiques sans restriction. C’est tout un système économique et politique qui autorise cette captation d’une ressource pourtant commune et vitale.


Article du journal Le Postillon n°67 : Ultra-méga bassine de ST Micro, à quand un soulèvement ?

Fin octobre, des milliers de militants et élus écolos se sont mobilisés contre les méga-bassines à usage agricole dans les Deux-Sèvres. Le parallèle avec la situation locale nous a frappés : ici personne ne s’est mobilisé contre le « plus gros investissement industriel depuis les centrales nucléaires », l’agrandissement de l’usine STMicro à Crolles, annoncé en grande pompe cet été. Pourtant cet industriel pille bien plus d’eau qu’une méga-bassine : dans un an ou deux, la consommation annuelle des usines de puces du Grésivaudan équivaudra à 16 méga-bassines de Sainte-Soline ! Alors que les élus écolos soutiennent toujours ce pillage de l’eau, bingo : de simples habitants entament une mobilisation. […]

La néo-députée EELV Cyrielle Chatelain, nouvelle coqueluche de l’Assemblée nationale, y est aussi allée de sa prise de position virtuelle sur le réseau social d’Elon Musk : « La mobilisation contre les #bassines est indispensable. Ce qui se joue à #SainteSoline nous concerne tou.te.s. C’est le combat pour le respect et le partage de la ressource en eau, la lutte contre son accaparation [sic] par une agriculture productiviste. » Quant au sénateur toujours EELV Guillaume Gontard, il n’a pas non plus reculé devant un tweet engagé : « Soutien ! #eau #biencommun #TransitionAgricole. »

Quelles prises de position courageuses ! Ce qui est curieux, c’est que les mêmes étaient présents cet été pour la venue de Macron à Crolles, lors de l’annonce de l’extension de l’usine de STMicro et des 2,3 milliards d’euros d’argent public investis dans « le plus gros investissement industriel depuis les centrales nucléaires ». À l’époque, aucune mobilisation en vue, ni blabla sur le « non-sens écologique et la fuite en avant ». Au contraire, Piolle avait trouvé cette annonce « réjouissante » et les députés écolos avaient fait un communiqué pour « saluer cette annonce qui renforce notre souveraineté industrielle » (voir le précédent numéro).

Où est la logique ? Cela signifierait-il que STMicro pomperait moins d’eau que la méga-bassine de Sainte-Soline ? Raté : cet ouvrage, le « plus gros actuellement en chantier », selon les opposants, a pour but de stocker 650 000 m3 sur une année. STMicro et Soitec, les deux industriels des puces prévoient eux d’utiliser « 29 000 m3 d’eau par jour à l’horizon 2023-2024 », notamment parce que le nettoyage des plaques de silicium consomme énormément d’eau.
C’est-à-dire qu’en 22 jours de fonctionnement normal, les deux usines du Grésivaudan vident la méga-bassine de Sainte-Soline. Soit une consommation annuelle 16 méga-bassines par an !

[…] Extrait du rapport d’activités 2020 de la régie des eaux : « Certains travaux sont encore à réaliser dans l’urgence pour subvenir aux besoins des industriels (ST Microelectronics à Crolles et Soitec à Bernin) en répondant à la demande à très court terme. La sur-sollicitation des installations et l’absence de secours de cet approvisionnement augmentent les risques de rupture d’eau avec des impacts importants pour le territoire et même au-delà. »


Article du journal Le Postillon n°68 : Comment STMicro pollue l’eau

[…] Selon les propres chiffres de ST (déclaration environnementale de 2021), 20 000 tonnes de produits chimiques sont utilisés chaque année sur le site de Crolles, un chiffre qui pourrait doubler dans les prochaines années avec l’augmentation de l’activité. L’eau ultrapure entre en contact avec la quasi-totalité de ces 20 000 tonnes et se fait donc polluer par des acides fluorhydrique et sulfurique, des métaux lourds (tungstène, titane, tantale…), de l’ammoniaque, de l’aluminium, du cuivre, de l’arsenic etc. La nature du polluant dépend de la partie du processus de fabrication dans laquelle l’eau intervient.

Voilà donc notre précieux bien commun joliment salopé. ST ne peut pas rejeter ses effluents pollués directement dans l’Isère, comme cela se fait dans d’autres pays. Ici, on est en France, et donc il y a des normes, des seuils, pour permettre à l’industrie high-tech de saloper l’environnement tout en respectant la loi. Il faut donc que l’eau sortant des usines à puces soit dépolluée.

C’est le rôle de la station de traitement des effluents liquides (STEL) de l’usine, qui est en train d’être doublée d’une deuxième unité pour faire face à l’augmentation de l’activité et, donc, de l’eau ultra-impure. […] En gros, il s’agit toujours de rajouter d’autres produits qui neutralisent les contaminants, puis d’autres qui les font précipiter pour ensuite les faire décanter. Les boues produites dans les décanteurs sont évacuées par camions dans des bennes, une partie (les biologiques) pouvant servir comme engrais, l’autre (les physico-chimiques) très contaminée, notamment par des métaux lourds, étant incinérée.

Ces processus finaux permettent à l’eau polluée de passer en dessous des seuils de pollution définis par la Dreal. Pour la com’ de ST, en réponse à nos questions, tout va bien car « 100% des effluents sont traités conformément aux réglementations en vigueur et il n’y a aucun rejet dans la nappe phréatique  ».

Effectivement, les effluents sont tous rejetés dans l’Isère par un seul tuyau caché à l’aplomb de l’usine. Ils sortent directement dans l’eau, impossible de voir leur couleur… ST a choisi Crolles non seulement pour l’inestimable ressource d’eau pure qu’offre le bassin grenoblois, mais aussi pour l’extraordinaire évacuation que lui offre une rivière comme l’Isère. Au passage, la rivière est un peu « réchauffée » par ces rejets, à environ 25 ou 27°. […]

Tout en respectant ces seuils, l’eau rejetée par ST est donc encore très polluée. Après toutes ces mesures et contrôles, elle est dite de « qualité rivière », une manière de dire qu’elle n’est pas potable – et a priori même pas baignable. […]

Les récentes révélations sur l’importante pollution de la nappe phréatique de Grenoble par l’usine chimique Arkéma (voir page 4) montrent que même en respectant les « seuils » définis par arrêté préfectoral, les rejets industriels peuvent rendre impropre à toute utilisation agricole ou de loisir une eau d’excellente qualité naturelle. Des pollutions infinitésimales répétées pendant des années peuvent pourrir un milieu physique, des polluants rejetés dans les rivières passant dans les nappes (les deux étant poreux). Il y a aussi le phénomène de bioaccumulation, soit l’accumulation dans les êtres vivants, de prédateur en prédateur, des substances toxiques. Tous ces risques ne feront que se multiplier avec l’augmentation de l’activité à venir de ST… De quoi apporter de l’eau au moulin des contestataires.


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