Travailleurs et travailleuses du social, sommes confronté.e.s dans notre quotidien aux difficultés, à la pauvreté, à l’exclusion .
Des maux générés par une société capitaliste où une minorité, le
patronat pour s’enrichir, appauvrit une majorité : nous, que l’on soit
salarié.e.s ou alors privé-e d’emploi, salarié.e.s du social ou alors
usager-e-s des services sociaux.
En cette période de fin de trêve hivernale, les questions sur le sens
de notre boulot s’imposent à nous, travailleurs et travailleuses
sociales : comment se fait-il que nous soyons capables de remettre à la
rue des personnes en situation de grande précarité, des migrant.e.s de
tous pays ? Serions-nous seulement les valets d’une politique anti pauvres, raciste, xénophobe portée par les gouvernements successifs ?
Ces derniers, main dans la main avec le MEDEF, continuent leur politique
de régression sociale : diminution du nombre de fonctionnaires,
économies sur les services publics jugés non rentables (éducation, santé,
etc. soumis alors aux logiques de marché) et privatisations, diminution
des subventions dans le secteur social, répression
et précarisation accrues…
Dans le secteur social comme ailleurs, la part des emplois non qualifiés
et sous statut précaire s’accroît quand le « noyau dur » des professions
sociales (éducateurs et éducatrices spécialisé.e.s, assistant.e.s
sociales, etc.) stagne.
La précarité devient le lot commun pour les travailleurs et travailleuses
du secteur social comme pour les usager.e.s auxquel.le.s ils et elles
s’adressent.
Ce qui est en œuvre dans le cadre du dispositif d’hébergement hivernal
en est un bel exemple. Il est devenu de plus en plus courant que les
structures qui accueillent des personnes à la rue le temps du dispositif
hivernal jettent leurs salarié.e.s, embauché.e.s en CDD, au même moment qu’elles remettent à la rue les personnes hébergé.e.s. (structures gérées par des associations qui, le plus souvent, sont conventionnées par la préfecture et touchent des subventions sur
la durée de ces conventions)
C’est en plus à ces salarié.e.s qu’incombe la tâche, ingrate, contraire
aux principes du travail social, illégale, de pousser vers la sortie
les personnes qu’elles avaient pourtant pour mission d’accompagner du
1er novembre au 31 mars : mettre dehors pour être mis.e.s dehors...
Il ne s’agit pas seulement d’une précarité en terme de contrats et de
conditions de travail mais aussi d’une précarité « morale » qui réduit
à néant toute possibilité de se projeter dans l’avenir puisque les
salarié.e.s, comme les personnes hébergées, sont volontairement
entretenu.e.s dans une désinformation concernant leurs sorts respectifs.
La précarité des contrats maintient les travailleurs et travailleuses
dans une position de soumission, d’application des directives
hiérarchiques sans possibilité de demander des comptes.
Le petit monde associatif, où tout le monde se connaît, oblige à
la docilité si on souhaite retrouver un travail dans le secteur.
Or c’est bien « l’éthique » et « la déontologie » du travail social,
qui sont mises à mal au travers de ce dispositif d’hébergement hivernal,
car notre mission n’est pas d’exclure mais d’accompagner les personnes
déjà en situation d’exclusion.
En ce sens nous piétinons nos professions qui visent à promouvoir le
changement social et travailler à la libération des individu.e.s.
En nous demandant de ne plus faire « avec », on nous fait collaborer
à un système qui n’a plus rien à voir avec le travail social.
Le principe de confidentialité est par exemple régulièrement bafoué.
Pour accéder à un toit, les personnes doivent faire part d’une grande
partie de leur histoire personnelle. Elles doivent accepter de divulguer
des informations de l’ordre de l’intime pour espérer une place en
hébergement. Les multiples signalements, liens avec les partenaires,
partages d’informations, ne garantissent pas un droit à l’intimité.
De plus, ce dispositif d’hébergement hivernal est un non sens car il
rend caduques les principes de continuité et d’inconditionnalité de
l’hébergement (droit au logement opposable de mars 2007 et article
L.345-2-2 du Code de l’Action Sociale et des Familles ) et le droit
d’accompagnement personnalisé ( loi de mobilisation pour le logement
et la lutte contre les exclusions du 25 mars 2009 ) inscrits dans la loi.
Non seulement les associations employeuses ne respectent pas la loi et
portent atteintes aux droits des usager.e.s. mais elles se facilitent
la tâche en employant du personnel précaire qui n’est pas en position
de revendiquer le respect de ses droits ni de ceux des personnes qu’il
est censé accompagner.
Il est ainsi demandé aux salarié.e.s de faire appliquer des règlements
illégaux et contraires aux missions censées être les leurs.
Lorsque le dispositif hivernal se traduit par une fin d’hébergement
sans proposition de relogement, ceci est une négation simple des droits
fondamentaux !
Au printemps 2014, des personnes hébergées soutenues et informées de
leurs droits par des collectifs militants auxquels participent des
travailleurs et travailleuses sociaux ont pu se maintenir
dans leurs hébergements et ceci malgré les pressions des directions
des associations hébergeuses et de la préfecture.
Il est possible de se mobiliser, alors profitons en :
– Mettons-nous en lien, parlons-nous, organisons-nous, soyons solidaires
pour refuser d’appliquer des directives illégales et contraires aux
principes du travail social, mais aussi pour exiger des places
d’hébergement supplémentaires en vue de l’octroi de logements
pérennes et plus de moyens pour pouvoir proposer un véritable
accompagnement social !
– Informons les usager.e.s, en situation de grande précarité, de leurs
droits et luttons ensemble pour les faire respecter (inconditionnalité
et continuité de l’hébergement d’urgence, droit à un accompagnement
personnalisé, pas d’expulsion de domicile sans décision exécutoire du
tribunal, droit de contester une OQTF avec l’aide d’un.e avocat.e et
en pouvant demander l’aide juridictionnelle,etc.) !
– Prenons contact avec les syndicats pour ne pas résister isolément,
utilisons le syndicat comme outil pour défendre nos droits de
travailleurs et travailleuses (refus de la précarité et de la logique
d’entreprise dans les structures sociales, etc.) ainsi que ceux des
usager.e.s ainsi que notre vision des services sociaux : égalitaires,
solidaires, accessibles à tou.te.s !
La CNT entend lutter sur la base d’un syndicalisme de démocratie directe
et révolutionnaire car il s’agit de combattre les causes de la misère
mais aussi de construire les fondations d’une société nouvelle.
Il est possible de s’organiser autrement et de gagner.
La CNT est un syndicat indépendant de l’état et des partis politiques.
Un syndicat autogéré sans chef, ni permanent.e.s.
Ce sont les syndiqué.e.s qui décident lors d’assemblées générales
souveraines.
La CNT est un syndicat porteur d’un projet de transformation sociale.
Contre la double oppression de l’Etat et des patrons, elle prône la
gestion directe de la société, par ses membres elles et eux-mêmes !